URBANISME
: CHANGER DE LOGIQUE ET DE M�THODE
A
Un bilan n�gatif
B
Cr�er un urbanisme d�mocratique
C
Faire respirer Paris
D
Une politique de long terme, �quilibr�e entre am�nagement
des quartiers de la Ville et les fonctions d�une
m�tropole internationale
On
dispose maintenant d�un recul suffisant pour
juger sereinement la politique urbaine de la
municipalit� parisienne : presque 25 ans. Ce
bilan est n�gatif, et chacun de ses �l�ments
inspire nos propositions : pour un urbanisme d�mocratique,
pour faire respirer Paris, pour engager une
politique de long terme.
A
Un bilan n�gatif
Ni
d�mocratie, ni respect des habitants. Les
processus de d�cision de la Ville sont opaques
marqu�s par la culture du secret et les m�thodes
technocratiques. Les r�sultats de cette
obstination autoritaire sont patents : op�rations
de r�novation conduites brutalement, faible prise
en compte des r�alit�s des quartiers,
marginalisation des associations dans les d�cisions,
poursuite de la destruction des quartiers
populaires et de l'organisation de la s�gr�gation
spatiale. M�me les �checs de la Droite en 1995
n�ont pas suffi � modifier ces sch�mas : le
semblant de concertation affich� ensuite ne fut
qu�un repli tactique.
Une
politique fonci�re injuste, incoh�rente et
actuellement insuffisante. La ma�trise du foncier
est un levier essentiel d�une politique coh�rente
d�urbanisme : elle permet de constituer des r�serves
pour pr�parer l�avenir, de limiter la sp�culation
et d�acqu�rir les terrains et immeubles
permettant d�installer services publics, espaces
verts ou logements � loyer mod�r�. Pendant de
longues ann�es, la politique de la Ville a
consist� � pr�empter des lots dans des
immeubles souvent v�tustes, en pr�vision d�op�rations
futures d�urbanisme, puis � les " oublier
" avec les cons�quences qu�on peut
imaginer : manque d�entretien, d�gradations
rendant la vie impossible aux locataires et
copropri�taires restants, squats, etc. Ces
pratiques toujours en vigueur se doublent
maintenant d�un quasi abandon de la politique
fonci�re, la Ville consacrant actuellement au
foncier environ 200 millions par an, contre 600 �
800 millions dans certaines des ann�es 1980.
Une
densification continuelle. Paris est l�une des
villes les plus denses du monde (20 400 habitants
au km2) Cette densit� est ressentie par tous les
Parisiens, et constitue un frein au d�veloppement
d�espaces verts, � l�installation d��quipements
sportifs consommateurs d�espace, ou tout
simplement � une vie plus a�r�e. Loin de
corriger progressivement cet h�ritage en tentant
de mieux �quilibrer le territoire parisien, la
Ville a c�d� de mani�re permanente � la
pression du march�, qui pousse �videmment �
densifier. Livr�e � l'automobile, la voirie
parisienne occupe une surface particuli�rement
importante, la moindre " dent creuse "
donne lieu � construction, l'urbanisme de dalle
et les r�novations multiplient les m�tres carr�s
par rapport aux b�timents pr�existants. C'est
donc un autre partage de l'espace urbain qu'il
faut promouvoir.
Le
nivellement architectural par le bas est l�un
des aspects les plus tristes de cette fr�n�sie
de r�novation urbaine. La forme urbaine de Paris,
plus que celles d�autres villes europ�ennes,
est constitu�e d�h�ritages parfaitement
identifi�s et dont la richesse cr�e la beaut�
si particuli�re de cette ville : immeubles du
XVIIIe ou du XIXe d�avant Haussman, fa�ades
haussmanniennes, architectures des anciens
faubourgs, etc. On ne compte plus les destructions
de pans entiers de cet h�ritage, permettant de
fructueuses op�rations immobili�res. Ce n�est
qu�au prix de combats acharn�s que des
habitants, des associations � et les �lus
d�opposition � parviennent parfois � faire
reculer la Ville.
Mais
en m�me temps, cet h�ritage a �t� remplac�
par des ensembles � l�architecture contestable.
Que l�on songe, par exemple, � la m�diocrit�
architecturale des ZAC qui ont fleuri sur le
territoire parisien dans les ann�es 1980 et 1990
!
Une
grave p�nurie d�espaces verts caract�rise
Paris. Si l�on excepte Boulogne et Vincennes,
excentr�s, chaque Parisien dispose en moyenne de
2,5 m2 d�espaces verts contre 25 � Vienne, 13
� Berlin, et 9 � Rome. En outre, leur r�partition
est profond�ment in�gale : 6 arrondissements
comptent moins d�1 m2 par habitant, 4
arrondissements entre 1 et 2 m2. La surcharge des
jardins par beau temps prouve amplement combien
souffrent de cette raret� les Parisiens,
notamment les enfants et les adolescents, qui
cherchent en permanence � �chapper au bruit, �
la voiture, � la pollution atmosph�rique, � la
laideur, � la salet�. Paris est l�une des
villes au monde o� ces aspirations profondes ont
�t� le plus n�glig�es. L�espace vert est
aussi un lieu de gratuit� et d��galit�. Or la
politique municipale dans ce domaine est profond�ment
insuffisante, puisqu�elle cr�e � peine 5 d�cim�tres
carr�s par habitant et par an.
B
Cr�er un urbanisme d�mocratique
La
transparence la plus grande s�impose pour toutes
les d�cisions d�urbanisme, d'habitat et de
circulation : celles-ci, fa�onnant � long terme
le visage de la ville, doivent �tre longuement m�ries
et d�battues entre les �lus, les citoyens et les
associations. Or, la premi�re condition d�un d�bat
loyal est l�honn�tet� et l�exhaustivit� de
l�information.
La
concertation est un imp�ratif absolu.
L�urbanisme a longtemps repos� sur des "
gouvernements de ville " autoritaires,
disposant de pouvoirs �tendus pour imposer le
changement. � Paris, cette vision a �t� pouss�e
jusqu�� la caricature. Mais les temps ont chang�
: l�urbanisme contemporain est confront� � des
groupes sociaux tr�s diversifi�s, des
territoires socialement et spatialement h�t�rog�nes,
une vie associative foisonnante et des aspirations
nouvelles des citadins. Aujourd�hui, l�am�nagement
urbain n�cessite de nouvelles formes de
conception et de mise en �uvre des d�cisions
publiques capables d�associer, de mobiliser des
habitants, des usagers, et des experts en amont et
en aval des prises de d�cision. En outre, les
citoyens ont droit, dans toute op�ration o� un
choix existe, � la pr�sentation objective des
diverses solutions. Ce sont ces nouveaux principes
que nous voulons mettre en �uvre. Il ne s�agit
nullement de d�poss�der les �lus de leurs
responsabilit�s mais d�en finir avec le secret
et l�autoritarisme.
En
premier lieu, le Plan Local d�Urbanisme,
substitu� au Plan d�Occupation des Sols par la
nouvelle l�gislation, sera l�occasion d�une
pr�sentation claire des diverses options, compr�hensible
par tous, avec la communication la plus large de
tous les documents pr�paratoires.
Ensuite,
les " p�rim�tres prioritaires
d�intervention " pr�vus dans ces nouveaux
Plans Locaux d�Urbanisme pourraient s�attacher
� r�parer les plus graves erreurs des 30 derni�res
ann�es, comme celles commises place des F�tes ou
aux Halles.
Enfin,
la d�centralisation dans les arrondissements
s�impose pour certaines d�cisions, certains d�bats,
certaines politiques que l�on ne peut conduire
qu�au plus pr�s des habitants. Outre les
modifications � la loi PML que nous proposons,
d�autres voies existent. Nous m�nerons ainsi
une r�forme des services municipaux en charge de
la conception et de la mise en �uvre des projets
d�urbanisme. Ces grandes directions verticales
de la Ville seront dot�es d�antennes d�centralis�es
au niveau des arrondissements. Chaque projet
urbain d�une certaine envergure verra la
nomination d�un chef de projet charg�
d�informer, de dialoguer et de mener la
concertation avec les �lus locaux, les riverains
et les associations.
C
Faire respirer Paris
La
priorit� accord�e aux espaces verts est
indispensable, pour les raisons de sant� et de
qualit� de vie que nous ressentons tous profond�ment.
L�objectif de la Ville doit �tre simple : qu��
terme chaque Parisien dispose d�un espace vert
� proximit� de son domicile.
L�effort
global doit �tre autant que possible doubl� et
port� � 20 hectares par an. Ce rythme
permettrait de rattraper les autres grandes villes
europ�ennes.
Les
espaces verts de proximit� doivent se multiplier.
La Ville doit faire jouer son droit de pr�emption
d�s que s�offre l�opportunit� d��tablir
un espace vert dans un secteur qui en est d�pourvu,
et inscrire au PLU de nombreuses " r�serves
d�espaces verts ". En outre, le nouveau
partage de l�espace, le recul de la voiture et
des op�rations de requalification urbaine doivent
permettre de cr�er des plantations diss�min�es,
changeant la physionomie de grandes art�res.
Enfin, l�emprise fonci�re de la Petite
Ceinture, doit recevoir � au moins sur certains
tron�ons � des am�nagements verts et de
loisir.
La
cr�ation de quelques grands parcs doit �tre
envisag�e. Ce sont eux les vrais sanctuaires de
calme, refuges contre toutes les pollutions
urbaines. La diff�rence avec les petits espaces
verts de quartier n�est pas seulement de surface
mais de nature. Un grand parc de 10 hectares
s�adresse � tous les �ges et cumule plusieurs
fonctions : repos, jeux, sports, pi�ces d�eau,
etc. Or Paris est cruellement pauvre en grands
parcs, par comparaison avec les autres capitales.
La municipalit� a pr�f�r� livrer une large
part des grandes surfaces lib�r�es (Halles) au
commerce, aux bureaux et aux logements chers, plut�t
que de cr�er de tr�s grands parcs. Dans ce
domaine, trois grands projets pourraient �tre mis
� l��tude et r�alis�s progressivement :
1)
Cours du Maroc, sur les terrains de la SNCF qui s�parent
les XVIIIe et XIXe arrondissements, doit �tre men�
� bien le projet des jardins d��ole,
consistant en un parc d�environ trois hectares,
c�est-�-dire la superficie du parc Andr� Citro�n
dans le XVe. Ce projet, largement engag�, �
l�initiative des deux maires du XVIIIe et XIXe,
permettrait enfin de disposer dans le Nord-Est
parisien d�un v�ritable poumon vert � c�t�
des Buttes-Chaumonts.
2)
Berges de la Seine. L�objectif, ici, est de les
rendre totalement ou partiellement aux promeneurs
et de relier d�ici 15 ans le Trocad�ro au
pavillon de l�Arsenal par une trame d�espaces
verts.
3)
Grand parc des Batignolles sur tout ou partie des
terrains SNCF reliant l�actuel jardin des
Batignolles, les voies de la gare Saint-Lazare
recouvertes et les entrep�ts des d�cors de
l�Op�ra. Ce pourrait �tre le plus grand parc
de Paris apr�s Boulogne et Vincennes d�congestionnant
les XVIIe et XVIIIe arrondissements et cr�ant une
transition verte vers Clichy.
Les
" espaces verts int�rieurs prot�g�s "
(EVIP) ne sont pas toujours encourag�s ni
sauvegard�s. Les moyens de contr�le ou de
contrainte dont dispose la Ville doivent �tre
employ�s pour �viter la disparition ou
l�amputation " discr�tes " de ces
espaces qui contribuent � l��quilibre �cologique
de Paris. Dans le cadre des permis de construire,
la Ville doit contraindre les promoteurs � cr�er
de nouveaux EVIP. L�ouverture de ces espaces au
public sera recherch�e � travers deux leviers :
n�gociation avec les propri�taires publics (h�pitaux,
HLM, Minist�res, etc.), conclusion de conventions
entre la Ville et les propri�taires priv�s.
La
mise en r�seau progressive des espaces verts avec
des liaisons exclusivement pi�tonni�res et
cyclables augmenterait la surface des espaces
publics sans r�duire les zones b�ties.
Il
faut, en outre, ma�triser et am�nager la densit�
de Paris, � travers un ensemble de mesures
d�effet progressif raisonn�es � l'�chelle du
territoire de la capitale, et en ayant � l'esprit
que compte tenu de l'exigu�t� de ce dernier,
l'occupation de l'espace public doit �tre
particuli�rement �conome.
C'est
dans le cadre de ces orientations d'ensemble que
des mesures drastiques pourront �tre �tendues
pour n�accorder que de mani�re exceptionnelle
un permis de construire sup�rieur (en m2) �
celui de d�molir, r�viser � la baisse le
coefficient d'occupation des sols (COS) de
certaines zones d'urbanisation en cours, limiter
les hauteurs d'immeubles, l�adjonction d��tages
suppl�mentaires par rapport � l�environnement
�tant une m�thode courante de densification.
Cette politique ne contredit en rien l�imp�ratif
d��volution de la ville, ni la construction
d��quipements publics ou de logements � loyer
mod�r� : elle les encadre seulement dans une
contrainte indispensable pour la beaut� de la
ville et le bonheur des habitants. Changer
d�air, c�est aussi sauvegarder l�espace.
D
Une politique de long terme, �quilibr�e entre am�nagement
des quartiers de la Ville et les fonctions d�une
m�tropole internationale
Quel
domaine plus que l�urbanisme exige une prise en
compte des exigences de long terme ? Red�finir un
projet urbain pour Paris suppose, par ailleurs,
que l�on tienne compte en permanence de deux �chelles
: celle des quartiers, des cit�s, celle d�une
ville centre d�une m�tropole mondiale qui n�cessite
des projets urbains structurants.
Quartiers
et cit�s : les Parisiens se sentent d�abord
concern�s par l��tat et l��volution des
quartiers o� ils vivent. Or nous refusons que la
capitale se r�duise � la juxtaposition de
quartiers dont les uns seraient bien entretenus et
soigneusement �quip�s parce qu�ils b�n�ficient
de toutes les attentions client�listes, alors que
d�autres s�enfonceraient dans le sous-�quipement.
Pour ces derniers, apr�s expertise objective et d�finition
de crit�res convenables, nous mettrons en �uvre,
sur la dur�e de la mandature, un plan de remise
� niveau des services et �quipements de proximit�
municipaux (cr�ches, haltes garderies, terrains
de sport, �quipements pour la jeunesse...). Il
nous faudra aussi, dans ces quartiers, aider � la
mobilisation des locaux commerciaux dont un trop
grand nombre sont inoccup�s, ce qui contribue �
leur d�sertification.
Des
projets urbains structurants devront �tre engag�s,
sachant que leur accomplissement d�passe la dur�e
d�une mandature :
Requalifier
la ceinture des Mar�chaux, qui d�limite sur 33
km, avec le p�riph�rique, une zone urbaine
largement n�glig�e, alors qu�y vit 1/6 de la
population parisienne. La Ville porte une
responsabilit� �vidente dans cette �volution pr�occupante
: 40 000 logements y d�pendent d�elle. Cette
requalification devra porter sur la circulation,
le mobilier urbain, l�am�lioration des
conditions de logement et le traitement des cit�s
d�j� �voqu� en associant les bailleurs
sociaux. Une "Op�ration de Renouvellement
Urbain" sur cette ceinture sera n�goci�e
avec l'�tat.
R�am�nager
les 52 carrefours et portes d�entr�e, en commen�ant
par les plus d�grad�s. Certaines de ces portes
sont quasiment � l�abandon et livr�es �
l�anarchie commerciale et urbanistique. Un plan
d�am�nagement progressif sera �tabli et mis en
�uvre avec les 21 communes limitrophes.
R�am�nager
le Centre-Ville. Le d�veloppement du tourisme y
acc�l�re les mutations commerciales et la sp�culation
a profond�ment chang� la sociologie. Diversifier
l�offre de logements et installer des activit�s
qui ne soient pas strictement commerciales devrait
" mus�ification ".
Refondre
les grandes places de Paris, qui sont devenues de
v�ritables �changeurs urbains. Une charte d�am�nagement
de ces places (Bastille, R�publique, Nation, Op�ra,
�toile, Ch�telet, Italie, Denfert-Rochereau,
Clichy, Stalingrad, Montparnasse,
Saint-Lazare...), pr�par�e dans la concertation,
sera mise en �uvre.
Cette
politique n�cessitera l�utilisation
d�instruments sp�cifiques :
Une
v�ritable politique fonci�re est la condition
sine qua non pour contr�ler l��volution de la
ville et concr�tiser nos objectifs en �quipements,
logements ou espaces verts. Nous proposons de
ramener les cr�dits de pr�emption � 600
millions par an, c�est-�-dire � leur moyenne
des 23 derni�res ann�es, contre 180 millions en
1999. En outre, le p�rim�tre des zones
d�intervention fonci�re sera �largi. Il est
enfin imp�ratif de relancer avec l�appui du
Gouvernement des n�gociations sur l�avenir de
terrains importants poss�d�s par des
administrations d��tat, l'Apr.-HP ou de grandes
entreprises.
La
conservation du patrimoine doit �tre une pr�occupation
constante de la municipalit� sans pour autant
tomber dans une vision pass�iste de la Ville :
Un
plan syst�matique de pr�servation ou de
reconversion, sera mis en �uvre en concertation
avec les riverains des diff�rents quartiers, dans
le cadre - jusqu�ici jamais utilis� - des zones
de protection particuli�re, combinant contraintes
juridiques et avantages fiscaux. Une attention
particuli�re sera port�e � certaines d�corations
int�rieures, de mani�re � �viter les
destructions de ces derni�res ann�es, lors de la
r�novation d�immeubles. Il ne s�agit
aucunement de transformer Paris en ville � mus�e,
mais au contraire d�assumer la diversit�
architecturale et la recherche contemporaine.
Cette politique sauvegardera ce qui m�rite de
l��tre dans l�h�ritage et le visage
traditionnel de Paris tout en favorisant la mixit�
urbaine et la cohabitation de formes
architecturales anciennes et contemporaines.
L�avenir
urbain de Paris ne peut pas se concevoir sur son
seul territoire. Nombreux sont les probl�mes
d�urbanisme, d�habitat, de circulation et de
transports qui n�cessitent des partenariats avec
les communes voisines, au moins � l��chelle de
la petite couronne. Il nous faudra travailler �troitement
avec les communes de banlieue : la conf�rence des
maires propos�e par ailleurs r�fl�chira en tout
premier lieu sur ces probl�mes. C�est dans ce
cadre que sera �labor� le Sch�ma de coh�rence
territoriale que la loi a substitu� au SDAU.
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